La représentation de la catastrophe dans I am a heroIl y a une alternance entre les moyens narratifs utilisés pour présenter la catastrophe
d'abord
- les scènes de déplacement rapide des personnages (course à pied, train, vélo, voiture)
- les média
- les visions (point de vue des personnes infectées)
Les scènes de déplacement rapideD'abord les scènes de déplacement rapide des personnages (course à pied, train, vélo, voiture) servent à présenter de multiples micro histoires ( souvent 1 case) et l'auteur en présence de 1 à 2 par page, à raison de 2 ou 3 planches généralement intercalés avec 1 réaction des personnages.
Elles lui ont permis de donner à voir un nombre très important de situations d'infection zombie qu'il a fait varier par le choix du décor (champ, immeuble, balcon, route, carrefour, voie ferrée, etc), l'âge et l'apparence des protagonistes.
Les médiasEnsuite, dans les média, là encore , il y a profusion, avec :
- la télévision,
puis la vidéo sur le téléphone ou internet
- le téléphone
- la radio (en voiture)
- l'internet et le chat
- la cibi, pour
citizen band, cad les fréquences radio alloués aux citoyens.
A noter qu'ils se sont tous éteints très rapidement, ce qui souligne l'effondrement des moyens de communications collectifs et institutionnels, à l'exception un peu bizarre du chat sur internet et la cibi.
Les vue subjectives de l'esprit Enfin, il y a les "visions" des personnages contaminés qui sont rangés dans les mêmes catégories que les flashback (souvenir) ou les flashforward (futur imaginé et désiré). Et qui d'une façon originale, ont pris le relai, du point de vue du lecteur, des média devenu silencieux.
A noter également ici l'introduction d'une catégorie spéciale de vision: celle ou le personnage confond imagination et réalité. Cette catégorie renvoie aux personnes infectées, en voie de transformation ou déjà transformées. Ici, il faut parfois s'y reprendre à deux fois, pour le lecteur, pour vérifier ce qui est du délire et ce qui est de la réalité.
Exemple : le chap 133,
Attention, dans cette scène, le personnage féminin est particulièrement perturbée sur son identité sexuelle et, in fine, sur son appartenance au genre humain. Cette vision lui vient au moment de basculer du côté des zombies et de s'enfuir.
page 15 ou le personnage se pisse dessus croyant pisser debout;
page 12 ou le personnage parle à un zombie qui est dans la maison d'à côté, la voyant assise à côté d'elle.
Cette catégorie a quelque chose de très particulier. En effet, à ma connaissance, c'est la première fois qu'un auteur donne à voir le point de vue subjectif/sur le monde des zombies. C'est une construction narrative très intriguante. En même temps, cette vision renvoie également à des catégories psychiatriques...
Conséquences narratives Sur le plan de la narration, l'utilisation des média et les interactions à distance entre personnages permettent de :
- provoquer des rebondissements (exemple : introduire un personnage, provoquer le déplacement d'un personnage d'un lieu à un autre, etc... ),
mais aussi de témoigner
- du vécu des survivants isolés (et donc développer une vision plus large et plus riche de la pandémie)
- de partager des ressentis (face à la catastrophe ou aux conditions de vie qui en résulte)
- d'échanger des informations utiles pour survivre (avec toutes les impasses, les erreurs et les tourments qui en découlent).
- de faire émerger la conscience collective une communauté humaine, malgré l'isolement et le désespoir des personnages pris dans la catastrophe
Ce qui va beaucoup plus loin que les scènes de déplacement rapides, qui reste largement dans le registre de l'action ou de l'observation. Et ou les personnages sont témoins de multiples incidents. J'insiste sur ce point, car ce type de développement narratif, à mon sens, à terriblement manqué au développement de la série Gantz par exemple.
D'ailleurs, après l'effondrement des médias institutionnels (télévision, radio, téléphone), dont Kengo Hanazawa souligne les réponses inappropriés, il insiste sur :
- l'isolement des survivants,
- la compréhension progressive des conséquences de l'épidémie par la "communauté" des survivants,
exemple : l'argent ne vaut plus rien, les déplacements sont dangereux, l'eau et la nourriture deviennent vitales, une arme à feu devient un objet précieux.
- témoigner de l'émergence de nouvelles représentations du monde, ainsi que des problèmes éthiques qui en découle. Exemple : la répartition traditionnelle des rôles hommes/femme réapparait, mais aussi la prédation sexuelle s'affiche.
Après la destruction des principales zones de réfugiés ( cf. mont fuji, les hopitaux, etc ), cela contribue régulièrement à rendre présent et faire entendre la voix de la communauté anonyme et cachée des survivants. A mon sens, c'est un contrepoint pertinent qui apporte un supplément de sens et de profondeur de champs vis à vis de ce que traversent les personnages principaux.
Au final, cela donne une vision d'ensemble du monde qui s'effondre et se transforme sous les effets de la catastrophe, qui ressemble en même temps, étrangement à un génocide. Cet aspect est beaucoup plus concret, réaliste et efficace que la tentative avortée d'oku dans la série Gantz.
Présentation de l'utilisation du chat sur l'origine de la pandémiePar comparaison à Gantz qui n'avait du tout utilisé la possibilité de communication entre survivants/équipes, dans la saison 2, Kengo Hanazawa fait un usage intéressant de ces outils. Exemple :
chap63 page 15le personnage d'Iura pose la question de l'origine de la maladie

chap 53 page 3le photographe introduit les hypothèses sur l'origine de l'infection
soit un agent pathogène
1 - manipulé par l'homme, soit une forme de bio-terrorisme
(hyp déjà présenté devant la base militaire américaine)
2 - virus inconnu d'origine naturelle
3 - voir même d'origine extra-terrestre ( = alien), ( vu à la télé

)

chap56 page 5, les hypothèses 2 et 3 sont abordés sur le chat par des anonymes, en même temps que son présenté des "brèves" (sorte de micro histoires qui se limite à une séquence).
Ici, c'est un peu le même effet que ce que le personnage principal découvre lorsqu'il court à travers la ville (cf. les situations aux balcons par exemple ou à travers les vitres du train )

chap57 page 2, l'hypothèse 3 est rappelé sur le chat par un anonyme
chap 75 page 5, le personnage d'Iura rappelle les 3 hypothèses

chap112 page 3 et 5, un anonyme médecin du chat revient sur l'hypothèse 1
Outre les bénéfices déjà présenté en première partie, il est intéressant de noter que l'auteur ne prend pas partie (pour l'instant) sur l'origine de la pandémie, mais qu'en même temps, il agite la question de l'origine de la pandémie et celle du responsable qui l'accompagne. La nature ? L'humain ? Des aliens ?
A noter que cet aspect avait également été négligé par Oku dans Gantz qui s'est privé de cette approche reflexive des personnages sur la réalité en transformation à laquelle ils sont confrontés. A l'inverse, Kengo Hanazawa s'en sort très bien en revenant de façon discrète et régulière sur cette question: qu'est ce qui m'arrive ? Pourquoi cela m'arrive ? En dernière instance, qui est responsable de ce qui m'arrive ?
Dernière édition par
phil1403 le 14 Déc 2014 15:37, édité 2 fois.